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Exercices spirituels

S’il y eut une matriarche au rang des patriarches, ce fut bien elle!

Son grand-père Nahor lui avait souvent parlé de son frère Abraham, une sorte de mystique ayant  tout quitté pour suivre un dieu qu’il ne connaissait même pas. Et cela la fascinait. Elle se demandait si, un  jour, elle ne ferait de même. “Partir”! Chercher… en étant sûr qu’on trouve le bout de ses attentes. Elle était travaillée de  l’intérieur, et se demandait quand viendrait le moment de fabriquer, elle aussi, une belle histoire d’amour.

Elle s’appelait Rebecca, vivait en Haute Mésopotamie au pays des  Chaldéens, et passait pour la plus belle fille du canton. Plusieurs prétendants tentèrent en vain de gagner son coeur et sa main: elle était d’un type plutôt indépendant qui, sans faire toujours à sa tête, ne s’en laissait pas imposer. Et son père Bétuel,  grand propriétaire terrien,  désespérait de la marier.  “Peut-être un jour, répétait-elle, si je trouve le parti qui me convient”. La belle Rebecca avait un caractère fort, tout comme son frère Laban qui menait pas mal les affaires du père; les deux semblaient destinés à faire la pluie et le beau temps… Et ils le firent.

Loin de là vivait, précisément,  le frère de son grand père, le fameux Abraham vagabond qui représentait, pour elle, l’idéal de la liberté. Les deux familles n’avaient plus eu de contact depuis la migration de  l’ancêtre Térah vers la terre des Cananéens. Toutefois, l’attachement était bien enraciné au coeur de chacun et il  serait déterminant quand les événements l’exigeraient. Entre temps, bénie du Seigneur, Saraï la stérile avait donné un fils à Abraham dans sa vieillesse. De son côté,  Milka, épouse de Nahor, avait mis au monde huit enfants dont Bétuel qui engendra Rébecca.

Il semble qu’Isaac, né de la vieille Saraï mise à sa retraite, fut élevé un peu sous les jupes de sa mère; il mit du temps à s’affranchir. Ce  ne fut qu’à la mort de son épouse, qu’Abraham songea à marier son Isaac. Mais il ne voulait pas que ce fût avec une fille des Cananéens, pays où foisonnaient  les cultes des faux dieux. Sans doute par fidélité aux inspirations de son Dieu, le Très-Haut (qui n’avait pas d’autre nom pour le moment), Abraham décida d’envoyer son vieux serviteur fidèle chercher une épouse à son fils dans les rangs de sa parenté en son pays d’origine. Il fit jurer solennellement à Éliézer de ne pas choisir ailleurs, et de ne revenir qu’après avoir fait tous les efforts pour réaliser son serment.

On ne jurait pas souvent, en ces temps-là, car cela correspondait quasi à une question de vie ou de mort. Aussi le vieil Éliézer s’en alla-t-il, avec ses dix chameaux et ses tonnes de cadeaux,  en suppliant intensément le Dieu de son maître de lui être propice. Qu’est-ce que ce Dieu ne ferait  pas  pour Abraham, son unique sujet!

En approchant de l’Aram des Fleuves, la Haute Mésopotamie où vivaient les descendants de Nahor, Éliézer adressa à Dieu cette prière:

Dieu de mon maître, sois-moi propice aujourd’hui et montre ta bienveillance pour mon maître Abraham! Je me tiens près de la source et les filles des gens de la ville sortent pour puiser de l’eau. La jeune fille à qui je dirai: “Incline donc ta cruche, que je boive et qui répondra ‘Bois, et j’abreuverai aussi tes chameaux’ sera celle que tu as destinée à ton serviteur Isaac, et je connaîtrai à cela que tu as montré ta bienveillance pour mon maître”.

Au même moment se présenta Rébecca, la cruche sur l’épaule. Elle n’était pas farouche la belle, et plutôt à l’affût de ce qui annonçait du nouveau. Quand elle vit ce vieillard fatigué, avec ses dix chameaux aussi haletants que lui, elle s’approcha. Et tout se passa comme la prière d’Éliézer l’avait exprimé au Dieu d’Abraham. Le Livre nous dit:

La jeune fille était très belle, elle était vierge, aucun homme ne l’avait approchée. Elle descendit à la source, emplit sa cruche et remonta. Le serviteur courut au-devant d’elle et dit: “S’il te plaît, laisse-moi boire un peu d’eau de ta cruche”. Elle répondit: “Bois, Monseigneur” et vite elle abaissa sa cruche sur son bras et le fit boire. Quand elle eut fini de lui donner à boire, elle dit: “Je vais puiser aussi pour tes chameaux, jusqu’à ce qu’ils soient désaltérés” . Vite elle vida sa cruche dans l’auge, courut encore au puits et puisa pour tous les chameaux. L’homme la considérait en silence, se demandant si le Très-Haut l’avait ou non mené à son but.

Pour récompenser la jeune fille de tant de délicatesse, Éliézer lui fit un cadeau: “un anneau d’or pesant un demi-sicle, qu’il mit à ses narines, et, à ses bras, deux bracelets pesant dix sicles d’or”. Rébecca n’en demandait pas tant pour répondre aux questions du voyageur: “Je suis la fille de Bétuel, le fils que Milka a enfanté à Nahor”. Et, sans plus, elle l’invita à se rendre chez elle où il trouverait gîte, nourriture et  repos, ainsi que de la paille pour ses chameaux. Décidément la belle Rébecca pensait à tout. Éliézer comprit que Dieu l’avait conduit chez le neveu de son maître et cela était de bon augure.

Entre temps, Rébecca avait fait part à son frère de ce qui s’était passé. Voyant les bijoux précieux que sa soeur avait reçus, Laban se  fendit d’égard pour le visiteur; il lui aurait donné la lune! On prépara un bon repas pour l’illustre hôte du Seigneur. Mais Éliézer, têtu comme un âne,  refusa et dit: “Je ne mangerai pas avant d’avoir dit ce que j’ai à dire”. Et Laban mena le bal en donnant la parole au visiteur. Celui-ci révéla qu’il était le serviteur d’Abraham,  et expliqua le but de sa visite: rechercher une épouse pour Isaac, le fils de son Maître.  Il raconta ensuite comment le Dieu d’Abraham avait exaucé sa prière en lui envoyant la belle Rébecca à point nommé. Selon  la Bible, Laban et Bétuel  prirent la parole, de concert, pour dire que cela leur paraissait venir de Dieu, mais qu’ils  ne pouvaient  conclure de par eux-même. Ils lui dirent que, quant à eux, ils étaient d’accord pour qu’il prenne Rébecca, qu’il l’emmène pour qu’elle devienne l’épouse du fils de son maître si telle était la volonté du Très-Haut. Aussitôt Éliézer couvrit Rébecca de cadeaux précieux; il en donna aussi à son  frère et à ses parents. Puis, l’on mangea avec appétit.

Tôt le lendemain de cette mémorable soirée, Éliézer se dit  prêt à reprendre la route: il ne voulait pas remettre à plus tard ce que le Très-Haut avait béni si généreusement. Laban et ses parents voulurent retarder le départ de Rébecca. Mais comme on la connaissait, il revenait à elle de décider. On lui demanda son avis: “Veux-tu partir avec cet homme?” Et elle répondit sur le champ, désireuse du voyage qui l’attirait depuis longtemps: “Oui, je le veux”. Ils la bénirent et lui dirent: “Notre soeur, ô toi, deviens des milliers de myriades! Que ta descendance conquière la porte de ses ennemis!” Ils ne se doutaient pas que leur prière allait être entendue du Très-Haut et que, par cette décision,  Rébecca ouvrait une autre page de l’histoire sacrée d’Israël – où elle jouerait un rôle taillé à sa mesure.

La Bible raconte comment Rébecca devint l’épouse d’Isaac et lui donna deux fils, des jumeaux  que l’on nomma Ésaü et Jacob. Or, en ce temps-là, comme en certaines cultures indigènes d’aujourd’hui, le fils aîné de la famille recevait tous les biens en héritage, avec une bénédiction spéciale du père; et les autres enfants devaient se débrouiller… Comme Ésaü était sorti le  premier du ventre de sa mère, il fut décidé qu’il était l’aîné… et que lui revenait le droit d’aînesse! Ce qui déplut à Rebecca qui, à maints égards, préférait Jacob à Ésaü. Jacob pouvait faire de beaux rêves, comme sa mère, tandis que l’horizon des intérêts d’Ésaü planait bas. Esaü  était un homme de la terre, que les préoccupations spirituelles de ses  pères, Isaac et Abraham,  ne passionnaient guère: il pouvait tout vendre pour une bon plat de lentilles! De son côté, Jacob nourrissait des aspirations à quelque chose de plus grand, et Rébecca – qui avait bien entendu, de la bouche de son époux, l’histoire du grand-père – s’employa à cultiver chez Jacob les désirs de descendance dont Abraham  avait tant parlé. Depuis toujours,  Rébecca avait cru  au rêve d’Abraham,  et elle était prête à suivre toutes ses intuitions pour contribuer à sa réalisation. Elle communiqua ses ambitions à Jacob et le convainquit de troquer le droit d’aînesse d’Ésaü pour quelque chose qui  comblerait la cupidité facile de ce dernier. Jacob réussit le coup du plat de lentilles. Le  premier pas de la transaction se trouvait réglé; Rebecca se chargeait de mener l’entreprise à bonne fin, au bon moment…

Et ce moment vint, celui de la bénédiction finale et irréversible que le vieil Isaac, presque aveugle, réservait pour son fils aîné, avant de rejoindre Abraham et Saraï au séjour des morts. Rébecca joua le tout pour le tout en déguisant Jacob et le substituant à Ésaü, au moment décisif. Isaac n’y vit que du feu et bénit généreusement son fils Jacob, ne se doutant pas qu’il offrait au Seigneur le descendant promis: le père des douze  tribus qui allaient constituer le noyau solide du peuple d’Israël. D’ailleurs le nom  Israël sera  d’abord celui de Jacob lui-même, à la suite de  sa rencontre tumultueuse avec le Dieu de ses pères, le Dieu d’Abraham et d’Isaac. Un nom venu de Dieu, qui dure jusqu’à ce jour…

On se demande toujours  si Rébecca a vraiment triché ou si Dieu a tout simplement béni ses intuitions créatrices d’histoire.  Car elle avait beaucoup de caractère la belle Rébecca de Bétuel à Nahor d’Ur en Chaldée! Et Dieu ne s’en serait-il pas servi pour compenser les faiblesses de personnalité d’Isaac – lequel se sera tout de même fait jouer un peu tout le long de sa vie! Et qui fut le plus patriarche-matriarche des deux: Isaac ou Rébecca?

Lectures

Bible – Genèse chapitres 11, 12, 22, 24, 25, 27.

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