Quatre ans après la publication de l’encyclique Laudato Si’, le Pape François cherche à encourager tous les acteurs du monde associatif, économique et politique à «travailler ensemble dans un esprit de solidarité afin de promouvoir des pas concrets pour la protection de notre planète». Cette encyclique est selon les mots du père Gaël Giraud, SJ et économiste, «l’unique document spirituel et aussi politique qui offre un horizon eschatologique du chemin écologique, de l’alliance avec la création. Et en même temps, il propose une analyse scientifique précise, avec des recommandations empreintes de réalisme.» L’Église et les autres acteurs doivent agir rapidement pour discerner les meilleurs moyens de protéger notre maison commune, les pauvres et les jeunes.
Des conséquences sur les pauvres et les jeunes
Les conséquences du manque de soin de notre maison commune ne frappent pas tous les pays ou les communautés de la même façon. En effet, ce sont les pauvres et les générations futures qui souffrent, et souffriront, des pires conséquences de la tragédie climatique. En effet, comme le démontre la situation actuelle, les pauvres sont, selon les mots du Pape, ceux qui sont les «plus vulnérables aux ouragans, à la sécheresse, aux inondations et aux autres événements climatiques extrêmes.» Ce que l’on constate par exemple avec le nombre croissant de réfugiés climatiques. C’est pourquoi il faut répondre doublement au «cri toujours plus désespéré de la terre et de ses pauvres.»
C’est ce message que François veut promouvoir, notamment avec les grandes industries. La semaine dernière par exemple, il a rencontré des responsables d’entreprises de l’industrie pétrolière. Soulignant leur ouverture au dialogue, le Pape a également insisté sur le fait que «pendant trop longtemps nous avons collectivement ignoré les fruits des analyses scientifiques» et que «désormais, les prévisions catastrophiques ne peuvent plus être regardées avec mépris et ironie.» Il faut un changement rapide, comme l’a souligné le récent rapport du GIEC. Comment? Notamment par une transition énergétique qui «peut générer de nouvelles opportunités d’emploi, réduire les inégalités et augmenter la qualité de la vie pour ceux qui sont frappés par le changement climatique» et par une communication transparente sur les investissements financiers, ces derniers devant viser à la fois la création d’emplois et la protection de l’environnement.
Ce changement de cap des industries et des banques est nécessaire, vital, mais il est parfois difficile de changer le cœur des principaux acteurs qui résistent à l’appel du pape et de la majorité des scientifiques. Dans l’excellente entrevue du P. Girauld, ce dernier explique que «la résistance apparait surtout dans le secteur bancaire. La transition écologique paraît très dangereuse aux banquiers, étant donné que les bilans sont encore marqués par la crise économique et financière de 2008.» Plusieurs banquiers ont d’ailleurs, selon l’expérience du jésuite, une vision très individualiste du monde.
Ils m’ont dit: « nous ne ferons rien, parce que nous avons lutté quarante ans pour prendre le pouvoir avec les marchés financiers, et on ne va pas tout lâcher maintenant sous le seul prétexte du changement climatique« . Alors je leur ai demandé comment ils se seraient comportés pour garantir un avenir à leurs enfants, et ils m’ont répondu qu’ils les auraient envoyés en Suède, parce que grâce au changement climatique ce sera un pays où l’on peut vivre.
Les banques et les industries ne sont pas les seules qui doivent bouger: les gouvernements aussi. Selon l’économiste, «la politique doit redécouvrir son devoir, la nécessité d’une stratégie qui prenne en considération le bien commun et un horizon de trente ans pour investir dans la conversion écologique et la ré-industrialisation, «verte».» Les outils sont connus, les étapes aussi, mais peu se fait.
Toutefois, le P. Girauld a également lancé des notes d’espoir: des Chinois qui mettent en pratique des politiques écologiques ou le gouverneur de la Banque centrale de Londres, Marc Carney, «qui après la publication de l’encyclique Laudato Si, en 2015, a clairement affirmé que le risque le plus important pour la stabilité financière est justement le risque climatique.»
Un appel à l’action: le Synode sur l’Amazonie