Un appel à être libre et courageux : Jeffrey S. Burwell, nouveau provincial des Jésuites du Canada

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Nouveau provincial des jésuites du Canada, le père Jeffrey S. Burwell a plusieurs cordes à son arc. Originaire de la Saskatchewan, élevé dans la foi catholique, il aime la chasse et la pêche, mais aussi l’orgue. Modeste quant à ses dons linguistiques, il parle néanmoins très bien le français, assez en tout cas pour être professeur agréé de français au Manitoba et en Saskatchewan.

Après cinq mois à la tête de la Province, le Père Burwell réfléchit aux défis qui l’attendent et aux possibilités qui s’offrent. Mais il approche ses nouvelles responsabilités avec une profonde confiance en Dieu: « Cette fonction m’apprend à approfondir ma confiance en Sa Divine Providence et en Sa volonté. » La foi le guide au moment d’aborder les grandes priorités de son mandat : restructurer la province, Regis College, les vocations, marcher avec les peuples autochtones et notre travail en Haïti.

Le père Burwell nous fait part ici de ses réflexions sur son style de leadership à la suite de Jésus, et explique les priorités de la Province, relevées par le Père général Arturo Sosa.

Le leadership

Le leadership du père Burwell naît d’une introspection réfléchie et d’une vision stratégique. Cet introverti de nature accorde une très grande importance à la loyauté, au soutien mutuel et à l’aptitude à élargir sa focale pour voir les choses dans leur ensemble. « J’ai un diplôme en administration de l’éducation, avec une spécialisation en gestion des ressources humaines, des systèmes et des structures », dit-il.

Il voit en effet dans les structures hiérarchiques le moyen le plus efficace d’atteindre les objectifs de la mission. « Je ne considère pas la hiérarchie comme une question de pouvoir. Il n’y a pas de postes supérieurs ou inférieurs ; chacun a un rôle essentiel à jouer et chaque rôle est reconnu et apprécié. »

Pareille approche se fonde sur la confiance et le sens des responsabilités. « Je n’hésite pas à faire confiance à ceux sur qui j’ai une certaine influence. »  Comme Jésus. « Jésus a envoyé les disciples prêcher et préparer le chemin. Il n’est pas allé les surveiller ou leur faire des suggestions. Il leur a présenté sa vision et les a envoyés. En matière de leadership, c’est aussi mon style. Je m’arrête rarement aux plans détaillés; ce sont les résultats qui m’intéressent. »

À l’exemple du Christ, le père Burwell fait une place à la remise en question. « Il n’y a pas de questions taboues. Les questions peuvent être inconfortables ou dérangeantes, mais elles ouvrent de nouvelles perspectives, révèlent ce que nous savons et mettent en évidence ce que nous ignorons. » Ce principe d’ouverture s’applique à son propre leadership : « Je veux que les gens me posent des questions. Je tiens à ce qu’on puisse me contacter et de demander des éclaircissements. »

« Jésus a envoyé les disciples prêcher et préparer le chemin. Il n’est pas allé les surveiller ou leur faire des suggestions. »

Déterminé à exercer un leadership empreint de compassion, le père Burwell a conscience des défis pratiques de son nouveau rôle. « J’ai pour principe de traiter les individus avec compassion, empathie et respect. Mais il arrive parfois, je le vois bien, en raison de la charge de travail, des horaires et du volume considérable de courriels, que le ton de mes réponses n’ait pas la compassion, la douceur ou le respect que je voudrais leur donner. Si mon action n’est pas vraiment chrétienne, si elle semble acerbe, si elle manque de fraternité, les autres ne doivent pas hésiter à me demander des comptes, car ce n’est pas ce que j’aspire à faire. » Il note toutefois avec gratitude que les jésuites canadiens sont « incroyablement bienveillants, indulgents et fraternels. »

Mission – Restructurer la province

Dès sa prise de fonction, le Père Burwell a reçu des directives précises du Père général sur les priorités de la Province. La principale concerne la restructuration de la province. La Province doit prendre des décisions importantes sur ce plan : des œuvres qui ont été des œuvres jésuites solides ont beaucoup diminué. Il faut une réflexion approfondie sur la manière de garantir que nos œuvres restent dynamiques et efficaces. « Saint Ignace n’a jamais vu dans cet exercice une « fermeture » des opérations, mais bien une réorientation en vue du bien commun. Il s’agit de concentrer les ressources là où elles pourront répondre aux plus grands besoins. C’est bien sûr un défi considérable, qui exige de l’audace, du courage et de la liberté spirituelle. »

Cet appel à un changement courageux était au cœur de l’homélie du père Burwell, le jour de la Saint-Ignace : il y contemplait Marie à l’Annonciation. « Elle n’a pas demandé de feuille de route pour les 33 prochaines années. Elle a dit oui. Pour ma part, je prie pour que les jésuites du Canada aient le courage, eux aussi, d’accepter la mission, même si cela vient perturber leur confort. »

« Saint Ignace n’a jamais vu dans cet exercice une « fermeture » des opérations, mais bien une réorientation en vue du bien commun. Il s’agit de concentrer les ressources là où elles pourront répondre aux plus grands besoins. »

Mission – La formation théologique

Une autre priorité du Père général vise à renforcer à terme la formation théologique au Canada. Le Père Burwell a entamé des discussions avec la direction de Regis College et d’autres intervenants sur la meilleure façon d’améliorer notre mission éducative pour les futures générations de jésuites et de partenaires laïcs. Ces conversations s’inscrivent dans le cadre de réflexions plus vastes menées au sein de la Conférence jésuite du Canada et des États-Unis sur la formation théologique. « Je veux donner toutes ses chances à l’avenir de la formation des jésuites au Canada », souligne le Père Burwell.

Mission – La promotion des vocations

La promotion des vocations est une préoccupation urgente pour la Province, d’autant plus qu’elle ne compte actuellement aucun novice de première ou deuxième année. « Cette situation nous a amenés à réfléchir aux raisons qui l’expliquent. Le Père général entend que la promotion des vocations soit une priorité absolue, soutenue par des ressources humaines et financières. » Le père Burwell a déjà pris des mesures à cet égard en nommant huit promoteurs afin d’assister le directeur des vocations.

« Nous devons promouvoir les vocations, mais nous devons aussi devenir le genre de communautés qui attirent les jeunes. »

« Cependant, même les meilleurs promoteurs de vocations n’aboutiront à rien si notre style de vie n’est pas attrayant, riche de sens et porteur de vie. » Le nouveau provincial met les communautés au défi de s’interroger : incarnent-elles les qualités d’une communauté joyeuse, zélée et accueillante, pressée d’accomplir l’œuvre de Dieu ? « Nous devons promouvoir les vocations, mais nous devons aussi devenir le genre de communautés qui attirent les jeunes. »

Mission – Marcher avec les peuples autochtones

Les Jésuites du Canada collaborent avec les peuples autochtones depuis des siècles, mais ces relations ont parfois été tendues. Ces dernières années, le père Burwell note que la province s’est transformée grâce à sa participation au processus de vérité et de réconciliation du pays : « J’ai participé à de nombreuses discussions officielles qui ont eu lieu pendant cette période, et certaines d’entre elles ont été incroyablement douloureuses. Cela dit, la vulnérabilité et la transparence sont des éléments essentiels de la croissance et de la guérison. Le Père Général apprécie la valeur de l’expérience de notre Province, non seulement pour nous-mêmes, mais aussi pour l’ensemble de la Conférence des Jésuites du Canada et des États-Unis. Reconnaissant également les années d’expérience personnelle du père Burwell auprès des Cris et des Dénés dans les Prairies canadiennes, le Père Général lui a demandé de regarder au-delà des frontières provinciales des Jésuites pour discerner comment les Jésuites du Canada et des États-Unis peuvent le mieux cheminer ensemble avec les peuples autochtones.

Mission – Haïti

La relation entre la Province et Haïti présente une complexité unique. Haïti fait partie de la Province du Canada, mais a son propre supérieur. Sa structure organisationnelle est en cours de révision et on s’apprête à nommer un nouveau supérieur. Bref, note le père Burwell, « au cours des cinq prochaines années, nous allons clarifier le chemin que nos confrères envisagent d’emprunter. »

Partenaires dans la mission

L’évolution des partenariats dans la mission constitue une dimension essentielle du ministère jésuite contemporain. Pour le père Burwell, cette dynamique remonte aux origines de la Compagnie : Ignace a vécu une rencontre privilégiée avec Jésus, qu’il a voulu partager avec d’autres, ce qui a finalement conduit à la fondation de la Compagnie de Jésus. « À mesure que grandissait la Compagnie, il nous a fallu des partenaires dans la mission pour élargir notre vision. Nous ne pouvons pas accomplir la mission jésuite tout seuls ; nous avons besoin d’autres personnes qui souhaitent travailler avec nous. Le défi pour les jésuites, c’est d’articuler notre relation avec nos collaboratrices et nos collaborateurs laïcs. »

Comme le souligne Pèlerins ensemble, cette collaboration suppose qu’on offre ses dons à la mission en vue d’un objectif commun. Si la vision d’Ignace est universelle et aide chaque personne à trouver un but et un sens à sa vie, la spécificité de la vocation jésuite demeure essentielle. « Nos partenaires prolongent notre mission commune, mais les jésuites restent le pivot entre l’œuvre et la Compagnie. » Sans implication directe de jésuites, que ce soit dans le fonctionnement quotidien ou dans les structures administratives, les œuvres s’isolent du réseau jésuite.

En conclusion, le père Burwell souligne que les jésuites ont beaucoup à offrir à un monde affamé de réconciliation et de justice. « Notre mission, c’est de veiller à ce que se poursuive l’acte sacrificiel de Jésus et tout ce qu’il implique. » Cette mission de réconciliation comporte quatre dimensions : réconcilier l’humanité avec le Père, réconcilier les gens entre eux, aider les individus à trouver la paix en eux-mêmes et nourrir nos liens avec toute la création. « Qu’est-ce que les jésuites ont à offrir au monde ? Avant tout et par-dessus tout, c’est Jésus que nous offrons. Nous attirons les gens en vivant sa mission de réconciliation. »

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