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Se perdre pour se retrouver

Par Jean-Claude Ravet

Être chrétien, c’est vivre une rencontre libératrice avec Jésus ; une grâce qui illumine et apaise, réconcilie et soulage, anime et fortifie et qui nous pousse vers l’avant. Cette rencontre bouleverse notre présence au monde et oriente radicalement nos pas vers la beauté et la louange, vers la justice et l’amour ainsi que vers la solidarité avec les « ébranlés du sens » et les inconsidérés de la société. Il y a, à l’origine de la vie chrétienne, un don qui germe dans notre existence et fait son chemin dans notre histoire particulière, sinueuse et cahoteuse, avec ses blessures, ses souffrances, ses joies et ses espoirs propres. Il y a la Vie infinie, le Dieu vivant, qui vient à nous, vulnérables et pauvres, plein de manques et de désirs, de regrets et de peurs – épousailles de l’éternel et du temporel, dirait Péguy. De l’immuable et du précaire. Du ciel et de la terre.  

La quête de soi à travers le voyage 

C’est dans cet esprit baptismal que je suis parti en pèlerinage de Taizé, en Bourgogne, vers Assise. Dix semaines de marche, sur 1500 km de sentiers étroits, caillouteux ou herbeux, parfois abrupts ou en lacets, ou de routes larges, goudronnées ou pierreuses. Un pèlerinage qui m’a mené à travers champs, forêts, torrents et montagnes, hameaux et villages, la plupart du temps sous un soleil torride, à l’exception de quatre jours d’orage. Je portais avec moi un sac à dos de 7 à 8 kilos, un chapeau aux bords amples sur la tête quand le soleil dardait, un bâton à la main – branche recueillie sur le chemin, devenue compagne de tous les jours –, une bouteille d’eau vitale, des sandales aux pieds pour sentir le plus possible le sol et l’air, la rosée et la fraicheur, aisées à s’en défaire pour marcher pieds nus dans l’eau, l’herbe ou la terre amies, et sans oublier un carnet précieux où recueillir souvenirs, pensées et paroles du chemin.La marche quotidienne se concluait dans un gite, un refuge, un dortoir paroissial, ou quelquefois chez une famille accueillant des pèlerins, pour se doucher et laver son linge « ensuanté », reprendre haleine et force, manger et dormir, et repartir le lendemain à l’aurore, seul et en silence.  

Le pèlerinage est une porte qui s’ouvre sur le seuil d’une terre sacrée où l’on se met à l’écoute de la Parole créatrice, à l’instar de Moïse. 

Le pèlerinage est une porte qui s’ouvre sur le seuil d’une terre sacrée où l’on se met à l’écoute de la Parole créatrice, à l’instar de Moïse. Une écoute de l’Évangile qui passe par les pieds, une rumination du livre de la Nature, une épreuve du sens par le sentir du monde et des anges qui le peuplent, un murmure à Dieu, mariant le souffle aux pas. Le pèlerinage s’apparente à un détour, voire à un égarement, qui comble et apaise, et incite à poursuivre la marche de l’existence, avec au cœur et à l’âme une présence amoureuse qui rappelle l’instant où le temps s’est figé dans l’éternité. Sans l’espérance, dit Héraclite, philosophe-pèlerin, nous ne pourrions accéder à l’inespéré. Le pèlerinage est à l’image de l’espérance : il est le seuil de l’inattendu. Le mien avait pourtant un terme : Assise, en Ombrie, une destination qui définit la fin même de ce pèlerinage : marcher avec le Poverello d’Assise sur les pas de Jésus, pauvre et humble. Cette fin est ainsi un chemin qui ne finit pas, sinon dans les bras de notre sœur la mort.  

L’ombre et la lumière 

Tout d’abord la vision de la beauté du monde, éclatante et enveloppante, m’a invité à l’abandon et a fait éclater la louange ; cette beauté m’a fait goûter à la joie et a fait jaillir ma reconnaissance devant cette vie si belle et si grandiose. Tout cela nous est donnée, à nous, si petits et si dérisoires, si indignes de tant de grandeur, et pourtant bien partie prenante de celle-ci. Il y a eu, ensuite, la montée constante, comme en riposte, en reproche, en révolte, du cri de la Terre et des femmes et des hommes au souffle haletant, humiliés, accablés par la misère, les souffrances, l’oppression – multitudes suppliantes, auxquelles en écho je joignais ma voix, mon souffle ténu, pour clamer justice et bonté pour tous et toutes. C’était un balancement constant entre présence et absence, chant et plainte, lumière et obscurité, beauté et souffrance, foi et espérance : la mémoire de la croix dans la lumière de la résurrection.   

Tout d’abord la vision de la beauté du monde, éclatante et enveloppante, m’a invité à l’abandon et a fait éclater la louange. 

Le chemin comme miroir de l’âme    

Le pèlerinage est une métaphore de l’existence vraie ; la vie comme un chemin. Il l’évoque et la simule à grands traits, le plus souvent grossiers, mais parfois sublimes, pour nous y entraîner joyeux et confiants, pour nous faire pressentir les dangers, les écueils, les tentations, les fuites, mais aussi la grâce, la présence divine qui se donne à nous quand l’angoisse ou le doute nous assaille. C’est pourquoi j’ai accroché à mon bâton la coquille d’un escargot pour m’en souvenir. Un rappel que, sur le chemin de la vie, l’avoir essentiel est infime, et ne fait qu’un avec son être. Le reste est superflu.

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Pèlerinage ignatien

Dans la spiritualité ignatienne, la vie elle-même est une forme de pèlerinage – un chemin vers une compréhension et vers une relation plus profonde. Le concept ne concerne pas seulement le voyage physique, mais aussi la richesse du parcours en soi. C’est une invitation à vivre chaque jour avec intention, à découvrir l’extraordinaire dans ce qui pourrait sembler ordinaire, et à reconnaître Dieu, dans les moments qui résonnent avec nos valeurs et désirs fondamentaux. 

Nous partageons tous ce voyage. Les jésuites offrent des repères et des communautés, ancrés dans des traditions qui prônent la justice, et où nos chemins uniques sont honorés. 

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